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Des eaux usées qui deviennent de l’engrais complémentaire au fumier : en matière d’économie circulaire, difficile de faire mieux que l’épandage des boues de stations d’épuration dont c’est la saison, juste après la moisson. Mais comment l’expliquer à des citadins angoissés par les zones de non-traitement, qui ignorent souvent que l’agriculture est une grande alliée dans le traitement de leurs eaux usées ? C’est l’une des missions de l’Association terre environnement recyclage*(Ater).
Créée en 1996, elle regroupe une trentaine d’agriculteurs du Béthunois qui épandent dans leurs champs 12 000 tonnes de boues venant de trois stations d’épuration : Béthune, Bruay-la-Buissière et Lapugnoy (62). « Nous étions les premiers en France à nous structurer ainsi, se souvient Pierre-Marie Walle, son président. Le but était de recycler les boues dans une logique de proximité. »
Et d’ajouter des contrôles à ceux déjà effectués par Véolia, exploitant des stations : les boues font, en effet, l’objet de contrôles inopinés par une technicienne de la chambre d’agriculture, qui vérifie également la teneur en azote des sols durant le printemps suivant.
L’association, qui compte aujourd’hui 34 membres, est à la recherche de quelques adhérents de plus. « Nous n’avons plus assez de surfaces d’épandage, explique Pierre-Marie Walle. Il faudrait une quarantaine de membres pour avoir une marge de sécurité. »
« Les boues des stations d’épuration font parfois peur aux agriculteurs, et le Covid-19 n’a pas aidé… reconnaît Dominique Queste, membre de l’Ater et cultivateur à Mazingarbe (62). La principale crainte, ce sont les métaux lourds. » Des craintes à relativiser en raison des analyses et du suivi des terres opérés par la chambre d’agriculture. « Quant à la peur de la contamination des boues par le Covid-19, il faut savoir que nos boues sont hygiénisées à la chaux, explique, à son tour, Frédéric Garache, agriculteur à Divion (62). Sans compter que comme elles sont analysées avant épandage, en cas de risque, elles seraient tout de suite incinérées. »
L’incinération est en effet l’autre solution à l’élimination des boues de station d’épuration. Mais cette solution est plus onéreuse pour la collectivité : « Si demain on ne recyclait plus les boues, l’eau coûterait aux citoyens trois à quatre fois plus cher ! », assure Pierre-Marie Walle.
Un argument brandi par la FNSEA et les JA dans la mobilisation contre les zones de non-traitement, qui ont coûté des hectares de terre aux exploitations périurbaines. Vous ne voulez pas de la pollution de la campagne ? Dans ce cas la campagne refuse de prendre celle de la ville. Tel était l’argument des agriculteurs qui ont lancé la « grève des boues » au début de l’année.
À l’Ater, si on a soutenu le mouvement, on n’a cependant pas fait grève. « Nous avons préféré honorer les engagements pris envers la collectivité, résume Pierre-Marie Walle. Nous avons une filière qui tient, on ne veut pas la fragiliser. »
Lucie De Gusseme
*Association terre environnement recyclage (ATER), président Pierre-Marie Walle : 06 78 35 43 50 / pierre-marie.walle@wanadoo.fr