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C’est peu dire que son livre a fait du bruit : depuis la sortie d’Un chasseur en campagne, le 18 août 2020, le patron des chasseurs de France Willy Schraen enchaîne les plateaux télé pour y défendre des facettes de la ruralité qui dénotent avec l’air du temps. Rencontre avec le grand méchant loup.
Willy Schraen : La préface d’Éric Dupont-Moretti a été l’élément déclencheur je pense, car entre-temps il est devenu ministre. Mais je vois bien aussi, dans les yeux des journalistes, qu’il y a une vraie surprise de tomber sur quelqu’un qui n’est pas dans le sillage de la pensée unique qui est de dire qu’il ne faut plus tuer d’animaux et ne plus manger de viande.
Je leur explique qu’ils se trompent, qu’on idolâtre le monde animal et que c’est une erreur. Notre relation avec lui est l’un des fondamentaux de l’espèce humaine : nous avons d’abord été cueilleurs puis éleveurs… Évidemment les temps changent, c’est normal qu’on mette un cadre, qu’on garde aussi en tête le respect du vivant. Mais on voit à quel point le rejet de la mort touche aujourd’hui nos sociétés. Qu’il s’agisse des animaux ou des humains, on en a peur, on ne veut pas la voir.
La fracture sociologique et territoriale entre ville et campagne n’est pas nouvelle. Mais depuis quelques années elle est aussi devenue idéologique. Il y a toujours eu des anti-chasse, des végétariens, mais la nouveauté ce sont les gens qui disent : je ne mange pas de viande, et je ne veux pas que tu en manges. Ces gens sont parfois violents, et harcèlent le monde rural dans ses passions et ses activités économiques.
L’idéologie qui veut enlever l’homme de la nature – car c’est le but de certains – est une erreur fondamentale. Dans un pays comme la France, toute la biodiversité est façonnée par l’humain. Laissez proliférer les cervidés dans les forêts… et dans dix ans il n’y a plus de forêt ! Laissez pousser les adventices dans les champs… et demain que mangera-t-on ?
Si on enlève la chasse, on a un problème écosystémique tout de suite. Le sanglier, qui cause de gros dégâts quand il pullule, est un bon exemple. Mais il y en a d’autres : le corbeau freux, la corneille noire… Une année sans chasse dans le Pas-de-Calais, comment ferait-on avec les lièvres ?
Je parlerai uniquement des chasseurs, mais pour moi, nous n’avons pas été à la hauteur. Nous avons eu une mauvaise politique : celle de vivre cachés. Ça a peut-être marché un peu, mais ça a aussi laissé un boulevard à la manipulation de l’opinion publique. La chasse, au fond, n’a pas besoin d’être défendue, juste expliquée. Mais ce n’est pas uniquement avec un bouquin et quinze jours de plateaux télé qu’on va réussir à rattraper des décennies de silence.
On n’a pas su expliquer la place de la chasse, comme on n’a pas su expliquer l’agriculture. Les attaques qui nous visent sont souvent les mêmes, pourquoi ne pas faire cause commune ?
J’ai souvent des engueulades avec le monde agricole, ce n’est pas un secret. Mais c’est un peu comme un couple qui se chamaille : quand ça touche aux enfants, on met nos querelles de côté et on fait front commun. Car le “référendum pour les animaux” est inquiétant. Si on va au bout de ce qui est écrit, que va-t-il rester de l’élevage ?
Nous devons nous emparer des sujets d’écologie et de biodiversité, et nous devons le faire avec le monde agricole. La vraie biodiversité n’est pas celle des réserves grillagées. Mais celle où nous marchons tous les jours !
Lucie De Gusseme