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Le saviez-vous ? On produit du champagne dans les Hauts-de-France. Et pas qu’un peu, comme l’explique Clara Dechelle, responsable commerciale de la maison Philippe Dechelle, lancée par son père : “On compte 800 vignerons dans l’Aisne, tous producteurs de champagne. Nous représentons une part importante dans l’économie des Hauts-de-France avec un chiffre d’affaires situé entre 20 et 25 millions d’euros par an. “
Le champagne, dans l’Aisne, c’est 3 400 hectares de vignes plantées dans 32 villages, soit 10 % du total de l’AOC Champagne (que l’on retrouve principalement dans la Marne, la Haute-Marne et l’Aube, mais aussi en Seine-et-Marne). Au total, plus de 20 millions de bouteilles y sont produites par an nécessitant l’emploi de plus de 10 000 saisonniers pour les vendanges. Une réalité bien souvent ignorée des autres habitants des Hauts-de-France.
“Nous sommes la troisième génération de la famille Dechelle, explique Clara. Nos grands-parents étaient déjà agriculteurs dans l’Aisne, mais c’est notre père, Philippe qui, en reprenant l’exploitation familiale, dans les années 1980, a pris le virage du champagne en rachetant des hectares de vignes.” Pour cela, Philippe Dechelle a suivi une formation au lycée viticole d’Avize (Marne). “Mon frère et moi travaillons sur l’exploitation. Lui à la vigne, moi comme commerciale. Notre sœur, communicante, ne travaille pas avec nous, mais nous fait profiter de son expertise“, raconte encore Clara.
Cette dernière, animée par l’ambition de reprendre la partie commerciale de l’exploitation familiale, a suivi un cursus spécifique. Après une licence en commerce international en vins et spiritueux à l’université de Reims, elle a complété son expérience par des stages assez longs en Asie et en Australie, notamment chez Rob Geddes, célèbre Master of wine australien, une référence dans le milieu.
La maison Dechelle, qui se présente comme une “petite” maison, produit 50 000 bouteilles par an à base de pinot meunier, l’un des trois cépages de champagne, celui que l’on trouve le plus dans l’Aisne, planté sur les neuf hectares de la propriété à Brasles, non loin de Château-Thierry, “dans la vallée de la Marne, une vallée très étroite à cet endroit-là avec un ensoleillement exceptionnel sur nos coteaux, sur des terres blanches argilo-calcaires, mais sans craie“, décrit notre interlocutrice.
“La spécificité de ce cépage c’est d’être fruité, gourmand et sain. Ça donne un champagne rond, puissant et souple, mais toujours intense et équilibré“, détaille Clara dont la mission, on l’aura bien compris, est de faire connaître et aimer ce breuvage. Une mission qu’elle remplit doublement : d’abord comme commerciale pour la maison familiale et comme secrétaire de l’Union de vignerons champenois du sud de l’Aisne, une association de 11 vignerons, particulièrement dynamiques et entreprenants.
“Aujourd’hui, nous vendons en direct à la propriété, chez des cavistes ou à des restaurateurs. Nous disposons également d’un site internet marchand. Enfin, nous réalisons 10 % à l’exportation.” Un chiffre trop faible aux yeux de notre interlocutrice : “Mon ambition est d’augmenter la part de l’exportation car c’est là que se trouvent les relais de croissance pour notre maison. En effet, nous sommes 4 000 vignerons de champagne sur le marché français, même s’ils ne disposent pas tous d’une force commerciale intégrée.“
Mais l’exportation reste compliquée et chère. “On commence à peine à exporter en Europe, grâce au soutien de la Région Hauts-de-France depuis 2019.” Pour aller plus loin et plus fort, Clara Dechelle va participer au salon Vinexpo à New-York, aux États-Unis, en mars. “J’y vais avec l’objectif de trouver des importateurs aux États-Unis qui sont le deuxième marché mondial derrière l’Angleterre.“
Cette vie convient bien à la jeune femme qui se décrit comme “très polyvalente avec une appétence pour le commerce, les relations clients et l’international“. Des relations qu’elle met pourtant entre parenthèses pendant les vendanges. “J’évite de prendre des rendez-vous pendant ces quinze jours pour vivre ce grand moment avec les saisonniers et toute l’équipe. C’est le moment clé de la saison, c’est là que tout se joue. Moi, je charge le pressoir, je ne veux pas passer pour la personne la plus fragile. D’ailleurs, sur l’exploitation, mon père ne fait pas de différence. Il me traite comme un garçon.”
Chez les Dechelle, la relève semble prête, ce qui devrait combler Philippe si on en croit Clara : “L‘aspect transmission est très important pour mon père.“
Hervé Vaughan