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Le confinement des Français a mis en évidence une situation paradoxale en matière d’approvisionnement en farine. Repas à domicile plus nombreux, achats de précaution… ces comportements ont vidé les rayons de la grande distribution en farine. Pourtant, les producteurs locaux n’ont jamais manqué de farine et ont même plutôt souffert de la crise.
« Évoquer une pénurie en France, deuxième pays européen producteur de farine, relève de la pure fiction », assure Jean-François Loiseau, président de l’Association nationale de la meunerie française.
Sauf que les grandes surfaces ne s’approvisionnent pas forcément en France. Entre 30 à 50 % des rayonnages seraient occupés par de la farine étrangère, essentiellement allemande, en raison de prix plus compétitifs. Mais la crise est passée par là. Les difficultés logistiques ajoutées à la priorité donnée au marché intérieur en Allemagne, ont touché le remplissage des rayons.
Résultat : les consommateurs ont cherché de nouvelles sources d’approvisionnement, plus locales.
« Les ventes ont explosé du fait de la rupture d’approvisionnement des GMS, confirme Marie-Odile Smets, de la Ferme de la Clarine, au Quesnoy-sur-Deûle (59). L’augmentation des ventes au détail a été très irrégulière d’une semaine à l’autre, mais a été multipliée par cinq a minima. »
Comme de nombreux agriculteurs, leur blé est moulu dans un moulin de la région. Comme à la Bassée. Là aussi, les ventes aux particuliers ont été multipliées, par deux. « Face à la pénurie dans les supermarchés, on a vu arriver des gens qui ne venaient pas avant, détaille Louis-Frédéric Sion, PDG de l’entreprise, qui emploie dix personnes et produit quelque 5 000 tonnes de farine à l’année. On a réussi à maintenir l’activité normalement avec toute notre équipe qui a été formidable. » L’approvisionnement n’a pas posé souci avec « les coopératives et négociants basés dans un rayon de 150 kilomètres. »
Mais cet afflux masque une réalité moins réjouissante. L’augmentation de la vente aux particuliers n’a pas permis aux moulins de la région interrogés de compenser la baisse de la consommation des boulangeries.
Car, dans le même temps, la demande en farine de la part de la boulangerie artisanale et des industries agroalimentaires s’est écroulée. Et celle-ci représente 90 % de la farine vendue en France.
Aux Moulins de la Bassée, les ventes de farine aux boulangeries représentent ainsi 70 % du chiffre d’affaires et celles aux industriels et restaurateurs (pizzerias, crêperies)… 25 %.
« La demande des boulangers reprend un peu, mais pas pour tous ceux qui faisaient des sandwichs ou fournissaient les collectivités, poursuit Louis-Frédéric Sion. Heureusement qu’on a eu la demande des particuliers pour compenser en partie cette perte. Cette crise montre que notre positionnement en circuit court nous a sauvés. »
Même constat au Moulin de Brimeux, dans le Montreuillois.
« La tendance générale est à la baisse avec une chute de 30 à 50 % des ventes pour les pâtisseries et boulangeries pendant le confinement. L’activité reprend tout doucement son cours », explique Maxime Dantre, responsable de la production de cette affaire familiale.
La suite, pour les meuniers, se dessine en pointillé. « On ne sait pas, on est dans le flou. On vit au jour le jour en fonction de la situation et de la demande. On espère retrouver une activité normale en octobre », souffle Maxime Dantre.
« Nous n’avons aucune visibilité car l’augmentation de nos ventes dépend du comportement des consommateurs », conclut Louis-Frédéric Sion.
Tous espèrent que leurs nouveaux clients poursuivront les habitudes prises pendant le confinement. Et que la demande reprenne en boulangerie et pâtisserie.
Claire Duhar